Chassignelles (Yonne) - Eglise Saint-Jean-Baptiste
Bien que Chassignelles soit un modeste village (autrefois du diocèse de Langres) et que son église soit isolée, à l’écart, cet édifice du XIIe siècle compte parmi les plus intéressants de Bourgogne pour sa décoration peinte très complète. La redécouverte de l’ensemble est récente : 2004.
Dès l’entrée, on est saisi par le cycle coloré de la voûte, entièrement non figuratif, où chaque travée se distingue par un décor spécifique, parfois encadré par un galon de grecques : maillons, losanges, médaillons… Est ainsi dessiné un véritable itinéraire iconographique qui, comme il se doit, conduit au sanctuaire. Là, les motifs sont sensiblement plus riches, avec des cercles garnis d’animaux « héraldiques », aigles ou lions. La volonté d’imiter de riches tissus de style oriental ou orientalisant est évidente ; c’était d’ailleurs une habitude au Moyen Âge de remplacer d’authentiques tentures, promptes à s’abimer, par des tentures feintes. Si le peintre de Chassignelles a cherché des modèles, il n’a pas eu à aller très loin : les trésors des cathédrales peu éloignées d’Auxerre et de Sens regorgeaient de soieries précieuses à motifs
Sur les murs du sanctuaire, selon un modèle très courant, les Apôtres entouraient le Christ en gloire, du côté du soleil levant. Les figures sont aujourd’hui très estompées, difficiles à lire pour certaines, mais l’organisation ne fait pas de doute et se retrouve par exemple, en Saône-et-Loire, à Brancion. L’analyse technique permet de dater ces figures saintes de la même campagne que les décors des voûtes, dont elles constituent ainsi l’aboutissement programmé. Aucun document ne permet de dater exactement cet important cycle ; l’examen des peintures ne permet guère de les placer avant 1250, mais il est difficile de se prononcer entre XIIIe et XIVe siècle.
Selon l’usage, les siècles suivants ont laissé leur marque sur les murs de l’église, d’une Annonciation de la fin du XVe ou du début du XVIe siècle à une large litre funéraire, dont l’emprise visuelle est forte. Cette litre fut placée à la fin du XVIIe siècle, au décès de Louvois, qui comptait Chassignelles parmi ses nombreuses seigneuries. On aimerait savoir aussi bien qui patronnait l’église trois ou quatre siècles plus tôt, ce qui permettrait de mieux comprendre pourquoi ce joli lieu de culte rural a reçu un décor si élaboré.
Texte Alain Rauwel - Photographies Marie-Gabrielle Caffin
Mots-clefs Chassignelles (Yonne), église, peintures murales, litre funéraire, Louvois, Annonciation, apôtres, Jean (saint)
POUR IMPRIMER CET ARTICLE CLIQUEZ SUR LE PDF CI-DESSOUS